Vraie reprise ou illusion monétaire ? Les marchés encore trop optimistes ?

26 juin 2020

Monthly House View - Juillet 2020 - Télécharger ici

Le marché a enregistré une forte accélération depuis la mi-mai, affichant des comportements d’achat ou de rachat de positions à découvert guidés par la panique et une rotation violente des valeurs de qualité/momentum vers les titres cycliques/value.

On est en droit de se demander si ce mouvement est durable ou exagéré, et s’il repose sur des bases solides ou sur des espoirs déraisonnables.

Premièrement, la réouverture des économies semble dessiner des tendances de reprise plus solides que prévu aux États-Unis. Si la panique qui a gagné les marchés en mars reflétait les anticipations d’une forte récession au deuxième trimestre, le violent rebond subséquent a accompagné l’assouplissement des mesures de confinement en mai, puis des données sur l’emploi et les ventes de détail meilleures que prévu aux États-Unis en juin. D’autre part, le rebond des prix du pétrole a réduit la pression sur les pays producteurs et sur le secteur pétrolier américain.

Deuxièmement, les banques centrales ont renforcé leurs interventions, avec une augmentation du programme d’achat d’actifs adopté en urgence par la Banque centrale européenne et un soutien accru de la Réserve fédérale américaine aux marchés de crédit. Ces politiques devraient limiter l’ampleur de l’augmentation des taux de défaut.

Troisièmement, les gouvernements n’hésitent pas à muscler leur réponse budgétaire. C’est le cas au Japon, qui a doublé la taille de son plan de relance, mais aussi aux États-Unis, avec des dépenses d’infrastructure atteignant 1 000 milliards de dollars, et en Europe, où se négocie un plan de relance de 750 milliards d’euros, dont 500 milliards de subventions. Quant à la Chine, elle envisage également de renforcer son soutien macroéconomique.

Toutefois, ces arguments positifs ne doivent pas nous faire oublier les incertitudes et les défis auxquels nous sommes confrontés. C’est le revers de la médaille.

Plusieurs questions se posent. Où en sera le taux de chômage européen dans un an ? L’apparition d’une deuxième vague d’infections en Chine entraînera-t-elle le retour de mesures de confinement à grande échelle ? Les marchés sont-ils encore trop optimistes sur la reprise des bénéfices et sous-estiment-ils les taux de défaut ?

De manière incontestable, la récente reprise des marchés boursiers reflète les effets mécaniques de l’activisme monétaire et le retour, aux États-Unis, de la politique monétaire à taux zéro (ZIRP). Des taux bas se traduisent par des valeurs actuelles élevées pour les bénéfices futurs, et impliquent que les prix des actions augmentent si les investisseurs évaluent les entreprises sur la base d’une prime de risque stable par rapport aux taux à long terme. D’une certaine manière, cette évidence mathématique peut être considérée comme une forme d’illusion monétaire, autrement dit un « artefact » actuariel ne reflétant pas les menaces qui pèsent sur les rendements nets au comptant des actions et des obligations d’entreprise. Si les dividendes et les rachats d’actions sont remis en question tandis que les taux de défaut progressent, les investisseurs devraient exiger des primes de risque plus élevées. De fait, la hausse des actions et le resserrement des spreads réduisent la marge d’erreur.

Ce phénomène pourrait se retrouver au cœur des préoccupations durant la saison des bénéfices du deuxième trimestre, car la poursuite de la hausse des marchés et de la rotation vers le style value nécessiteront une confirmation bottom-up à ce stade.

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Monthly House View, paru le 17/06/2020 – Extrait de l'Editorial

26 juin 2020

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